perpetuel Klezmer
Denis CUNIOT, pianiste klezmer
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Arche - Avril 2007

QUAND LE PIANO CHANTE LE KLEZMER

Au début des années 80, un son juif réapparait en France, en provenance des Etats-Unis : le son klezmer. La musique klezmer était cette musique de fête des communautés juives d’Europe de l’Est qui rythmait les évènements rituels ou sacrés et qui était interprétée par des musiciens itinérants, souvent très pauvres, et dont le talent n’était pas toujours reconnu à sa juste valeur. Mais avec l’immense vague d’immigration de la fin du XIXème siècle et du début du XXème siècle aux Etats-Unis, cette « musique yiddish » avait rencontré le jazz. Le klezmer d’aujourd’hui est une musique de fusion, de rencontre, d’influence.

Cuniot est un des acteurs majeurs de la transmission de ce patrimoine culturel. Il a participé au renouveau de ce style musical, qu’il a su enrichir et faire évoluer à travers les nombreuses rencontres qui ont jalonné sa carrière : il y eut en 1983 le duo Peylet-Cuniot, avec Nano Peylet, clarinettiste du groupe Bratsch ; puis le duo Yomguih-Cuniot avec Guillaume Humery de Klezmer Nova ; et tout récemment encore Denis Cuniot est à l’origine de la création de la fanfare klezmer d’Ile de France, avec Yann Martin, le trompettiste de Klezmer Nova.

Une longue réflexion

Et le piano dans tout cela ? C’est dans ce domaine que Denis Cuniot ets un précurseur, un fondateur. Un klezmer, c’est itinérant : vous avez déjà essayé de transporter un piano sur votre dos ? Denis Cuniot a été l’un des premiers à intégrer le piano dans des formations klezmer, et à lui donner un nouveau titre de noblesse.

A ses débuts, Denis déclenchait la stupeur. Au fil des années, il a su imposer son instrument, son talent, ses idées. Par ailleurs il a toujours eu à l’esprit que chacune de ces musiques dont il était l’héritier avait un auteur. D’où un souci de l’exactitude qui le pousse, depuis ses premiers albums, à signaler avec force détails, l’origine de ses interprétations : il réinstaure ces créateurs dans notre histoire. Confidentiel Klezmer n’échappe pas à la règle.

Depuis son enfance, Denis Cuniot est imprégné de culture yiddish, une culture indissociable pour lui de la musique klezmer. Il dédie d’ailleurs son disque « à tous les poètes et musiciens du monde yiddish et klezmer ». Cet album, exceptionnel de par sa conception et ses interprétations, est déjà salué unanimement par le public et la critique. L’écrivain et cinéaste Robert Bober dit de lui « Ecouter Denis Cuniot, c’est l’entendre à notre tour écouter ce qu’il entend, ce qui, une fois pour toutes, est inscrit en lui. »

L’univers de Cuniot est musical, poétique, parfois excentrique, voire humoristique, mais surtout authentique. Il puise ses sources au cœur du répertoire traditionnel : Oyfn pripetshik, de Max Warshawsky (1840-1907), A Brivele der mam’s, de Shlomo Shmulovitz (1866-1943), Odessa Bulgar, d’après des enregistrements de Mishka Tsiganoff réalisés dans les années 20, Papir iz dokh vays, d’Eliakim Zunser (1936-1943), pour nous le faire redécouvrir à sa façon, alliant la tradition à la modernité. Cuniot est également compositeur (Passage(s), Belleville-Drancy par Grenelle), dans la lignée de ceux qui l’ont précédé.

Denis a mis longtemps à oser le solo. Son dernier disque, Denis Cuniot Solo, Confidentiel Klezmer, aboutissement d’une longue réflexion, est une œuvre majeure : son piano devient un orchestre à lui tout seul. Par son audace et son talent, il fait que cette musique continue d’exister, comme un patrimoine juif universel qui continuera à bouleverser les générations.

Lise Amiel-Gutmann.
Arche Rédaction

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